Archive pour janvier 2015

Variabilité des critères du dépistage

jeudi 22 janvier 2015

En 1968, l’OMS établissait la liste des critères du dépistage des maladies, pour tenter d’empêcher les dérives.

1. Il faut que la maladie dont on recherche les cas constitue une menace grave pour la santé publique.

2. Il faut qu’un traitement d’efficacité démontrée puisse être administré aux sujets chez lesquels la maladie a été décelée.

3. Il faut disposer des moyens appropriés de diagnostic et de traitement.

4. Il faut que la maladie soit décelable pendant une phase de latence ou au début de la phase clinique.

5. Il faut qu’il existe une épreuve ou un examen de dépistage efficace.

6. Il faut que l’épreuve utilisée soit acceptable pour la population.

7. Il faut bien connaître l’histoire naturelle de la maladie, notamment son évolution de la phase de latence à la phase symptomatique.

8. Il faut que le choix des sujets qui recevront un traitement soit opéré selon des critères préétablis.

9. Il faut que le coût de la recherche des cas (y compris les frais de diagnostic et de traitement des sujets reconnus malades) ne soit pas disproportionné par rapport au coût global des soins médicaux.

10. Il faut assurer la continuité d’action dans la recherche des cas et non la considérer comme une opération exécutée « une fois pour toutes ».

L’application stricte de ces dix critères devait logiquement aboutir à la suppression de tout dépistage.

Après plusieurs amendements, les critères ont été édulcorés et l’imprécision de chaque critère ouvre désormais la porte à tous les dépistages. Mais l’ensemble du texte a une très belle allure.

Voici donc la nouvelle liste :

1. Il faut que le programme de dépistage réponde à un besoin reconnu.

2. Il faut que les objectifs du dépistage soient définis dès le début.

3. Il faut définir une population cible.

4. Il faut que des preuves scientifiques reconnaissent l’efficacité du programme de dépistage.

5. Il faut que le programme comprenne la sensibilisation, les tests, les services cliniques et la gestion du programme.

6. Il faut qu’il y ait des mesures d’assurance de la qualité, y compris des mécanismes pour réduire les risques potentiels du dépistage.

7. Il faut que le programme garantisse un choix éclairé, la confidentialité et le respect de l’autonomie.

8. Il faut que le programme encourage l’équité et favorise l’accès au dépistage pour l’ensemble de la population cible.

9. Il faut que l’évaluation du programme soit prévue dès le début.

10. Il faut que les avantages globaux du dépistage l’emportent sur le tort qu’il peut causer.

Comme c’est simple : lorsqu’un texte ne correspond pas à la politique désirée, on le remplace par un autre mieux à même de la justifier.

Référence

Histoire simple des médicaments anti-obésité

mardi 6 janvier 2015

Le Mysimba® vient d’obtenir son autorisation de mise sur le marché en Europe. Ce médicament contient un anti-opiacé, le naltrexone et un antidépresseur amphétaminique, le bupropion, deux molécules toxiques utilisées dans diverses cures de sevrage avec de bien maigres résultats.

L’obésité est l’unique indication de ce nouveau médicament, avec les mises en garde d’usage, toutes politiquement correctes.

L’histoire des médicaments anti-obésité est d’une extraordinaire simplicité. Aucun n’a jamais eu le moindre effet thérapeutique, l’épidémie d’obésité n’a fait qu’empirer depuis la première tentative de régler ce problème sanitaire par la pharmacologie. Toutes les molécules ont été retirées du marché en raison de leur toxicité, même lorsque la pharmacovigilance était quasi inexistante. Les petites améliorations de la pharmacovigilance ont permis de raccourcir le délai entre commercialisation et interdiction, passant d’une vingtaine d’années, pour les premiers, à moins de cinq ans, pour les derniers.

Pléthoryl®, Isoméride® et Pondéral®, trois amphétamines (comme le bupropion de Mysimba®) ont été retirées du marché entre 1988 et 1997. Triacana®, à base d’extraits thyroïdiens a été interdit en 2004, le rimonabant (Acomplia®) en 2008, la sibutramine (Sibutral®) et le Médiator®, dernière amphétamine célébrissime, en 2010. L’orlistat (Alli®) a été retiré par son fabricant, tandis que la forme Xenical® est en cours d’abandon en raison d’un rapport bénéfice/risque négatif.

Pour tous ces médicaments, sans exception, les mises en garde, indications et précautions d’usage n’ont jamais été respectées, multipliant le nombre d’accidents et aggravant la négativité de la balance bénéfices/risques.

L’enseignement à tirer d’une telle saga est sans équivoque : aucun comprimé ne peut régler le problème de l’obésité dont les causes environnementales sont d’une extrême complexité.

Les ministères de la santé n’ont pas su tirer cet enseignement qu’aucune étude ne pourra jamais contredire. Il ne fait aucun doute que ce nouveau produit sera retiré du marché après avoir apporté plus de désagréments que de bénéfices.

Alors pourquoi  une telle autorisation ?

La réponse est encore plus simple. Parce que le nombre de clients potentiels dans le monde est évalué entre un et deux milliards. Même avec seulement cinq ans d’autorisation de vente, le bénéfice escompté permet un lobbying capable de flouter tous les conflits d’intérêts.

Les ministères de la santé n’ont pas pour vocation de protéger les obèses, enfants fragiles de notre misérable abondance.

Empiler le marché pharmaceutique sur le marché agro-alimentaire pourrait être une excuse acceptable si la richesse induite diminuait la misère de cette fragile et captive clientèle, mais là aussi, hélas, le marché pharmaceutique et les ministères de la santé ont échoué.

Références