Archive pour juin 2008

La nutritioniste

mercredi 18 juin 2008

Tout seul, je n’aurai jamais osé le dire comme cela. C’est injuste et politiquement incorrect. Et puis en y réfléchissant, je me dis qu’elle a peut-être raison. C’est une femme, elle est nutritionniste, elle est compétente et très connue dans notre région. L’obésité des enfants était notre sujet de formation médicale continue de la soirée. Lorsque je lui ai demandé quelle en était la première cause, elle a répondu sans hésitation : « le travail des femmes ».

Je n’aurai jamais osé.

Puis elle a développé… Les femmes n’ont pas le temps, elles posent les enfants à l’école en voiture en partant au travail, elles les laissent devant la télé, elles passent leurs envies de sucreries pour remplacer leur suave présence, elles culpabilisent, et compensant en gavant leurs enfants.

Elle avait raison, cependant, elle avait fait une grosse lacune en oubliant de parler du père qui fait exactement les mêmes erreurs. Cela me prouvait déjà la prédisposition innée des mères à la culpabilité, donc leur prétention naturelle à la maternité, voire exclusive à la parentalité.

Il nous restait à débattre. Du côté des enfants, tout est vrai, sucres, télé, grignotages et sédentarité sont bien les responsables de la décadence graisseuse. Côté parents, les avis ont divergé. Les extrémistes voulaient visser les femmes à la maison, avec ou sans voile. Les socialistes voulaient un salaire de mère au foyer, ce qui revient au même. Les autoritaires voulaient casser les télévisions. Les écologistes voulaient faire exploser les MacDonald et les usines à grignotis. Certains proposaient l’éducation sanitaire de masse, bonne idée, mais il fallait la télévision…

J’étais perplexe. Avec mon machisme latin résiduel, je suis un défenseur de l’emploi des femmes, car je les trouve encore plus belles quand elles travaillent. Avec ma pédiatrie impénitente, je suis pour un minimum de six mois à un an de présence de la mère auprès du nouveau-né, pour le sein et pour la suavité. Avec ma faible culpabilité de père, j’ai encore de la place pour héberger une partie de celle de la mère. Avec mon moralisme médical, je suis vraiment opposé à la sédentarité sous toutes ses formes.

Alors, il m’est venu une idée, de celles que l’on n’ose pas dire, simpliste, fruste, utopique.

Et si tout le monde allait à l’école et au boulot à pied. Ça ferait un nombre considérable de mains pour aider les enfants à traverser les rues.

Des rues sans voitures.

En tout cas, dire brutalement ce que la nutritionniste a dit au sujet des mères. Je n’aurai jamais osé.

De l’utilité inattendue de l’homéopathie !

mercredi 18 juin 2008

De l’utilité inattendue de l’homéopathie ! Allopathe et clinicien traditionnel, conscient depuis toujours de l’inefficacité tant pharmacologique que physiologique de l’homéopathie, j’ai cependant acquis la conviction du caractère indispensable de cette pratique médicale, pour plusieurs raisons : sanitaires, économiques et expérimentales. La méta analyse récemment publiée dans « The lancet » et démontant l’homéopathie, est très instructive. Ces méta-analyses sont souvent pertinentes, car elles relativisent les résultats des essais cliniques, corrigent leurs nombreux biais et parfois (pas toujours hélas) mettent le doigt sur la partialité de leurs financeurs. Celle-ci conclue, fort logiquement, à l’égalité d’effets entre le placebo et l’homéopathie. Paradoxalement, pour la rigueur des essais cliniques, la granule homéopathique possède un réel avantage, car elle est logiquement dépourvue de tout effet secondaire. Le patient n’ayant aucun moyen de deviner s’il prend le placebo ou la granule, permet une application correcte de l’indispensable principe dit du « double-aveugle ». Ce point est capital si l’on sait qu’une autre méta-analyse publiée dans une autre revue prestigieuse conclue à l’absence de contrôle du double-aveugle dans 98% des essais cliniques dits « sérieux » * . Ainsi, seuls 2% des essais cliniques de médicaments allopathiques en double-aveugle contre placebo sont scientifiquement recevables ! Enfin, les médicaments dits « allopathiques », dont l’effet bénéfique est largement supérieur aux effets secondaires sont très rares et nous pouvons aisément citer leur quasi-totalité : insuline, vaccins, anticoagulants, neuroleptiques, antibiotiques et morphine.

Le scientifique « soignant » et porteur d’un réel « projet » sanitaire doit donc éviter la prescription des autres médicaments allopathiques pour les innombrables pathologies encore « indéterminées ». Ce scientifique là est bien conscient des carences de la médecine moderne dans le soin personnalisé et il ne peut qu’encourager les médecines complémentaires sans s’agacer inutilement de la présence de médiateurs symboliques (granules, aiguilles, gélules colorées, hosties, chimies ou prières) apparemment indissociables du fait humain.

Luc Perino

* Fergusson D et coll. British Medical Journal, 2004 ; 328 : 432-434