Saga des marqueurs cardio-vasculaires

Les facteurs de risque cardio-vasculaire tels que le tabagisme ou l’obésité sont établis depuis longtemps. Mais nos impératifs de progrès ont négligé ces facteurs triviaux pour en proposer de plus biologiques tels que LDL, HDL, NT-proBNP, BNP, CRP, autant de sigles définissant des molécules dont le taux varie selon l’état du cœur et des vaisseaux.

Pendant longtemps, les deux cholestérol (HDL et LDL) ont régné sur ces marqueurs. Mais, depuis une vingtaine d’années on a compris que l’inflammation, évaluée par la CRP, jouait un rôle important dans les maladies cardio-vasculaires. Même l’insuffisance cardiaque dont le diagnostic clinique est évident possède désormais ses marqueurs (NT-proBNP, BNP).

Jusqu’à ce qu’un groupe de 60 chercheurs internationaux, inquiets de ce genre de dérive, réalisent une méta-analyse portant sur 165 000 sujets et concluant au peu de significativité clinique de ces marqueurs. D’autres études ont montré que de vieux marqueurs de l’inflammation tels que la NFS et la VS pouvaient suffire. Cent autres ont montré que l’accumulation de ces marqueurs apportait peu de précision clinique et que leur utilisation dans les essais cliniques était souvent abusive et peu rigoureuse.

Certaines statistiques sont allées jusqu’à critiquer la validité même des marqueurs. Dans l’insuffisance cardiaque, un taux élevé de cholestérol semble associé à une meilleure survie. Chez les patients coronariens trop de « bon » cholestérol devient néfaste. Quant au mauvais cholestérol, il ne serait ni le meilleur marqueur de risque, ni la meilleure cible thérapeutique.

Mais comme rien ne peut empêcher le progrès, en 2020, des chercheurs ont proposé quatre marqueurs pour prédire le risque de mort subite (réservés aux patients adeptes de sensations fortes). 

Ces polémiques, inhérentes à la variabilité biologique et à l’imprévisibilité clinique, sont parfois amusantes, et le sont plus encore les études qui constatent naïvement que les marqueurs biologiques rejoignent le bon sens clinique. Par exemple, un régime alimentaire riche en fruits pendant 8 semaines suffit à faire baisser plusieurs de ces marqueurs de risque. Qui l’eût cru ? Ou que l’augmentation des N-glycanes, eux-mêmes liés à la consommation de sucre sont de bons prédicteurs du risque cardio-vasculaire. Comme c’est étrange ! Ou que le manque de sommeil augmente les taux de CRP. Comment diable est-ce possible ? Ou que les gamma GT, marqueurs d’alcoolisme sont aussi de bons marqueurs de risque cardiovasculaire. Quelle surprise ! Cette science naïve a découvert la résistine, une protéine qui augmente en cas d’obésité, d’inflammation et d’athérosclérose, et qui marque le lien entre ces trois états. Comme cela est inattendu !

Certains osent désormais simplement démontrer que l’exercice physique prévient l’hypertension, l’insuffisance cardiaque et tous les risques, même lorsque les marqueurs sont mauvais.

Il y a deux façons de pratiquer et de consommer la cardiologie : avec ou sans marqueurs.

Bibliographie

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