Abominable prédiabète

Le dernier congrès européen de diabétologie a donné l’alerte sur un fardeau mondial croissant : le prédiabète.

Précisons avant tout que « diabète » désigne deux maladies totalement différentes. Une maladie auto-immune grave nommée diabète de type 1 (DT1) et une maladie de civilisation très fréquente, liée aux excès de consommation de sucre, nommée diabète de type 2 (DT2). La conservation du même nom pour deux maladies aussi dissemblables fait partie des aberrations qui ne peuvent s’expliquer que par des intérêts n’ayant rien à voir avec la science clinique.

Lorsque les médias ou les médecins parlent de diabète sans mentionner le numéro, ils évoquent toujours le DT2, car il représente 95% de l’ensemble.

A son début le diagnostic de DT2 était posé pour une glycémie à jeun supérieure à 1,4 g/l. Puis ce taux est passé à 1,2g/l, faisant doubler d’un coup le nombre de diabétiques dans le monde.

Le DT2 survient lorsque l’insuline n’arrive plus à faire face à l’excès de consommation de sucre. Tout commence par une insulino-résistance, aujourd’hui détectable, que l’on nomme donc le prédiabète. Quelle extraordinaire découverte : les maladies incubent avant d’être détectables. Nous avons donc tous une pré-surdité, une pré-impuissance, une pré-Alzheimer, voire un pré-cancer.

Mais on peut détecter le prédiabète encore bien plus tôt en observant la consommation de sucre qui est passée de 7 kg par an et par personne au moyen-âge à 30 à 100 kg aujourd’hui.

Les congressistes ont estimé que 20% des prédiabètes évolueront en DT2 dans les 5 ans. Qui aurait pu le croire ? Ils ont osé une prévision de 10 % de prédiabétiques dans la population en 2045. Cela parait bien peu au vu de la consommation de sodas et autres sucreries consommées à tout âge et hors de toute raison.

Le bubble-tea est une nouvelle boisson très sucrée dont la prévision de marché est de 5 milliards € annuels. Le marché des antidiabétiques étant bien plus élevé, les laboratoires peuvent s’offrir des congrès savants, alors que les marchands de soda ne peuvent s’offrir que des publicités télévisées. Fort heureusement pour le commerce, les plus gros buveurs de soda sont aussi les plus téléphiles et les plus savants diabétologues sont aussi les plus congressistes.

Le congrès s’est enfin effrayé de voir des pays inconscients qui ne dépistent pas le prédiabète. Ces mêmes pays ne savent probablement pas mieux dépister les pré-diarrhées, pré-paludismes et pré-tuberculoses qui vont tuer 6 millions de personnes chaque année.

Les publications triviales de ces congrès sponsorisés répondent aux critères exigibles pour être publiés par des revues scientifiques. Prouesse de la mercatique médicale consistant à bafouer le bon sens sans véritablement corrompre la science. Rien à redire. Même l’OMS approuve ces rapports.

Avez-vous remarqué que le verbe « durer » a disparu des médias ? Aujourd’hui, malgré notre société de zapping, tout « perdure ».

L’humanité pourra-t-elle perdurer après la découverte du prédiabète ?

Bibliographie

Un commentaire sur “Abominable prédiabète”

  1. Lefrançois dit :

    Merci mon cher confrère pour votre billet plein d’esprit et de malice, et tellement vrai !!
    BRAVO !
    Un certain nombre de « Labos pharmaceutiques », impliqués dans la production et la vente de « médicaments » curatifs, voire « préventifs », du diabète (de type 2) ont un grand avenir commercial qui s’ouvre devant eux, et ont tout particulièrement intérêt à ce que notre société de cons-sommation continue, à travers l’industrie agro-alimentaire, à vendre de plus en plus des produits auxquels vous faites allusion (sodas, confiseries, viennoiseries, et autres biscuits, à index glycémique élevé).
    Si j’étais policier, je me demanderais « à qui profite le crime »; car il s’agit bien d’une mise en danger de la santé et donc de la vie de la population, et tout particulièrement de la jeunesse, lorsque la publicité et les multiples incitations trouvées par l’industrie agro-alimentaire à la con-sommation de sucres sous les appellations les plus variées, est autant développée.
    Continuez/continuons le combat !
    Bien confraternellement,
    Dr Jérôme Lefrançois

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