Association de malfaiteurs biologiques et économiques

L’héritage parental peut se résumer en quatre points-clés. Le plus connu est l’héritage génétique dont la part relative apparaît de plus en plus faible. Nous héritons aussi des marques épigénétiques que notre père a laissées sur ses spermatozoïdes et notre mère sur ses ovules, plus précisément, des marques qui ne sont pas effacées au moment de la fécondation ; et il y en a beaucoup plus qu’on ne le pensait. Nous héritons aussi des marques épigénétiques de notre vie intra-utérine. Enfin, nous héritons de l’éducation parentale et de l’environnement de notre enfance qui posent aussi leurs multiples marques sur nos gènes et en modulent l’expression.

Longtemps avant ces découvertes, on avait constaté que le comportement des enfants est très dépendant de leur éducation. Il est déjà écrit dans la bible que Dieu punit l’iniquité des pères sur les enfants jusqu’à la troisième et quatrième génération.

L’épigénétique a fait beaucoup plus que de cautionner ces évidences. Elle a permis de révéler que les stress vécus par les parents, tels que l’holocauste, les guerres ou les attentats, entraînent des répercussions sur leur progéniture, même si ces évènements ont eu lieu avant la conception.

Les maltraitances infantiles vécues par la mère retentissent sur le volume de matière grise cérébrale de ses enfants et sur la structure des neurones. L’anxiété des mères pendant la grossesse double le risque de troubles psychologiques chez l’enfant. Une étude vieille de 35 ans révélait déjà que les enfants de singes abusés pendant leur enfance étaient plus souvent abuseurs à leur tour. Ce fait a été largement confirmé chez l’homme, tant par l’observation que par l’épigénétique.

Le tabagisme maternel pendant la grossesse laisse des marques épigénétiques qui persistent au moins jusqu’à l’adolescence et augmentent le risque de tabagisme par la suite.   

L’héritage épigénétique de l’obésité et des famines est largement démontré. Les plus connus sont les ravages de l’alcoolisme fœtal et les dramatiques syndromes de sevrage des nouveau-nés de mère droguées. Les antidépresseurs, benzodiazépines et autres psychotropes prescrits pendant la grossesse provoquent également ces syndromes chez les nouveau-nés.

Tout cela permet d’affirmer qu’un enfant adopté à la naissance est certainement plus le vôtre qu’un enfant de vos gènes né par GPA.

Enfin, du côté social, nous découvrons les liens entre le statut économique et des troubles mentaux comme l’hyperactivité ou la schizophrénie. Les social-démocraties des années 1970 avaient réussi à limiter ces inégalités de naissance. Hélas, la droitisation, la financiarisation et la mondialisation tendent à les réaggraver dramatiquement.

Ainsi, la biologie moderne nous fournit des preuves encore plus tangibles du cycle infernal auto-entretenu des inégalités psycho-sociales.

Devant cette cohésion de la biologie, du marché et de la politique, confinant à une association de malfaiteurs, il est plus important que jamais de naître riche et en bonne santé.

Bibliographie

Un commentaire sur “Association de malfaiteurs biologiques et économiques”

  1. Lefrançois dit :

    Bravo et merci pour cet article génial (à la fois de bon sens et de culture scientifique, trop rarement associés).
    Bien confraternellement,
    Dr Jérôme Lefrançois

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