Archive pour le mot-clef ‘vaccins’

Vaccins, pourquoi ne fait-on pas comme pour les médicaments ?

samedi 10 juin 2017

Les vaccins constituent la plus belle victoire de la médecine. Jusque dans les années 1970, les vaccins avaient une place à part dans le marché sanitaire. Leur mise sur le marché était initiée par des instituts ou des ministères, leur rentabilité était faible et ils jouissaient d’une image vierge de tout conflit d’intérêts. Tous les médecins en étaient des promoteurs, fervents, discrets et efficaces.

C’est dans ce contexte qu’ont pu être introduits avec une grande efficacité des vaccins non obligatoires (rougeole, oreillons, rubéole, coqueluche, méningite à haemophilus, etc.) avec des taux de couverture vaccinale à peu près identiques aux taux des vaccins obligatoires.

Progressivement, plusieurs éléments sociaux sont venus modifier la sociologie vaccinale et ternir l’image idyllique de la vaccination. Nous pouvons les résumer en quelques points :

– Les nouveaux médias et l’utilisation de la polémique comme générateur d’audimat ont donné un grand pouvoir aux sectes anti-vaccinales.

– Le marché a commencé à s’intéresser à ce secteur considéré jusqu’alors comme peu attractif.

– De nouveaux vaccins ont été mis sur le marché pour des pathologies dont l’impératif de santé publique n’apparaissait pas urgent d’emblée à tous les médecins (pneumocoque, méningocoque, HPV).

– Enfin, quelques maladresses ont levé des suspicions sur de possibles effets secondaires et de possibles conflits d’intérêts (Hépatite B, grippe H1N1).

L’image de la vaccination s’est dégradée en France, car les ministères n’ont pas adapté leur communication à ces nouvelles données sociétales. Mais la plus grave erreur est de toujours considérer les vaccins en bloc ; ce qui est compréhensible de la part des sectes, mais ne l’est pas de la part des ministères et des médecins. Le vaccin antigrippal n’a pas la même efficacité que le vaccin antipolio, les vaccins anti-méningocoque ou anti-rotavirus n’ont pas le même intérêt public que le vaccin antidiphtérique ou anti-hépatite B.

Il est important de se référer à ce qu’est vraiment un problème de santé publique. Une maladie, un risque ou une habitude sont des problèmes de santé publique lorsqu’ils sont assez fréquents et assez graves. L’alcoolisme, la grippe, la tuberculose, le tabagisme, la prématurité, la dépression ou la maladie d’Alzheimer  sont des problèmes de santé publique. La varicelle est fréquente mais elle n’est pas grave, elle n’est donc pas un problème de santé publique. La méningite à méningocoque est grave, mais elle n’est pas fréquente, elle est un grave problème de santé individuelle, mais elle n’est pas un problème de santé publique.

Nous devons encourager nos ministères à faire pour les vaccinations ce qu’ils ont réussi à faire pour les médicaments avec les fameux niveaux de SMR (service médical rendu). Il est urgent de rompre avec le dogmatisme vaccinal, inventons le SPR (service public rendu) pour juger les vaccins.

Références

Vaccinations sanitaires et marchandes

samedi 12 mars 2016

Pendant très longtemps, le commerce des vaccins n’a pas répondu aux règles du marché. C’étaient les institutions scientifiques, tel que l’institut Pasteur, et les ministères qui décidaient de l’utilité d’un vaccin, de sa fabrication, de sa promotion et de sa diffusion. Les marchands s’intéressaient peu à ces produits d’intérêt public, dont l’environnement administratif et le caractère parfois obligatoire rendaient la marge nulle ou dérisoire. Ce n’est pas un hasard si l’Europe, berceau de la santé publique, fabrique encore aujourd’hui 90% des 4 milliards de doses de vaccins vendus chaque année dans le monde, alors que les USA, berceau de la santé marchande, entrent tardivement sur ce marché.

Cette entrée est cependant remarquable, puisque le vaccin anti-pneumo, dont l’intérêt public est certain, mais modeste, appartenant au seul laboratoire américain du secteur, est devenu en quelques années le leader en termes de chiffre d’affaires. Introduisant ainsi dans le marché vaccinal, la loi générale du marché sanitaire qu’est le rapport inverse entre prix de vente et intérêt public.

Ce marché vaccinal, qui ne représente que 3% du marché pharmaceutique mondial, est attractif par sa belle progression, puisqu’il est passé de 10 milliards d’euros en 2007 à 20 milliards en 2012, et à 40 en 2015.

Sur le milliard d’euros des vaccins remboursables vendus en France, 65%  sont obligatoires, et 35% sont représentés par les deux vaccins (anti-pneumo et anti HPV) dont le ministère public n’a été qu’un promoteur secondaire ou sous influence. Ainsi le pays de Pasteur risque de perdre son leadership, tant moral qu’économique – espérons que les deux soient encore liés en médecine –, s’il laisse aussi ouvertement le facteur marchand déborder le facteur sanitaire dans ce domaine très particulier de la vaccination.

Les vaccins sont, à ce jour, les seuls vrais médicaments de prévention primaire, ils sont le plus beau succès de toute l’histoire de la médecine. Leurs résultats épidémiologiques sont limpides, puisque pour certains d’entre eux, la maladie concernée a fini par disparaître.

L’obligation vaccinale initiale historique, basée sur l’intérêt public, se révèle aujourd’hui être une erreur pour ce même intérêt public ; on peut cependant la supprimer sans risque en éduquant les citoyens à la responsabilité sanitaire individuelle et civile. Les chiffres confirment qu’un vaccin non obligatoire peut atteindre 90% de couverture vaccinale, et que le caractère obligatoire n’arrive jamais à faire dépasser ce pourcentage.

Mais, dans le domaine vaccinal, laisser s’aggraver la confusion entre santé publique et santé marchande serait une erreur beaucoup plus grave qui détournerait encore plus de citoyens des vaccins indispensables que n’en détournent aujourd’hui les sectes anti-vaccinales.

Références

Vaccins en général et en particulier

dimanche 3 mai 2015

La communication sur les vaccins se fait souvent sans nuance, tant par les ministères qui les promeuvent que par les sectes qui les dénigrent, en bloc.

On parle souvent d’utilité, d’efficacité ou de méfiance sans préciser de quel vaccin il s’agit ; c’est comme si l’on disait des médicaments en bloc « ils sont bons » ou « ils sont mauvais ».

Cela n’a aucun sens, aucune valeur critique, et explique la panne épistémologique autour de ce thème sanitaire majeur.

Pour chaque vaccin, comme pour chaque médicament, il faut se poser les questions essentielles. Présente-t-il des dangers réels ? Est-il indispensable pour la santé publique ? Quels sont les effets secondaires ? Le rapport bénéfices/risques est-il positif ? Quelle est l’efficacité par rapport à l’objectif initial ? Il n’est pas toujours possible de répondre d’emblée à toutes ces questions, mais généralement on peut y répondre après quelques dizaines d’années d’utilisation.

Le vaccin antipolio est sans danger, sans effet secondaire, indispensable à la santé publique et individuelle, le rapport bénéfice/risque est infini, l’efficacité est totale par rapport à l’objectif, car la maladie a disparu.

Le BCG présente quelques effets secondaires, il est important pour la santé publique, il n’est que partiellement efficace et n’a pas permis d’atteindre l’objectif initial.

Le vaccin antigrippal est important pour la santé publique, il est sans danger, il est moyennement efficace et n’a toujours pas permis d’atteindre l’objectif fixé.

Les vaccins contre l’hépatite B et la rougeole sont indispensables, sans danger, sans effet secondaire, et permettent d’atteindre l’objectif chez les personnes vaccinées.

Les vaccins contre la varicelle et le rotavirus sont inutiles pour la santé publique. Le vaccin contre la varicelle présente un danger de recrudescence d’une maladie plus grave à l’âge adulte. Le vaccin contre rotavirus présente quelques effets secondaires, et à long terme, il peut faire émerger la virulence d’autre virus intestinaux communs. Aucun des deux ne semble pouvoir atteindre l’objectif initial.

Terminons cette liste non exhaustive par le vaccin contre le papillomavirus. Il est sans danger ni effet secondaire, il est modérément important pour la santé publique. Il diminue les infections visées, mais personne ne peut encore répondre à ces deux questions : les souches de papillomavirus non couvertes par le vaccin peuvent-elles acquérir de la virulence et l’objectif de supprimer le cancer du col de l’utérus sera-t-il atteint ? L’OMS le recommande pour les filles de 9 à 13 ans dans tous les pays, car elle espère une réponse positive à ces deux questions, mais nul expert ne peut l’affirmer aujourd’hui. Si la prévalence de ces cancers diminue, le vaccin aura partiellement atteint son objectif, sinon, il aura été inefficace ou n’aura pas atteint la cible des personnes vulnérables.

Médicaments ou vaccins, la médecine ne progresse pas avec des promesses, du rêve ou des spéculations mais avec des preuves concrètes.

Références

Massacres de vaccinateurs

mardi 19 novembre 2013

En 2001, le monde avait tremblé d’un étrange effroi culturel en apprenant que les Talibans avaient fait dynamiter les deux gigantesques sculptures des Bouddhas de Bamiyan, classées au patrimoine mondial. Ces statues dataient d’une période préislamique qui insultait leur histoire revisitée.

Puis le monde a fini par oublier et relativiser cette grossièreté. Force était de redécouvrir que ces folies destructrices avaient toujours eu cours en tous lieux et de tous temps. Les révolutionnaires français avaient décapité les statues à la gloire de l’Ancien Régime, et Mao Zedong avait lancé ses gardes rouges à l’assaut des sculptures et des temples bouddhistes. On pouvait alors penser que rien n’est jamais vraiment nouveau sous les cieux de la barbarie…

Ce qui déroute le plus notre observation des Talibans, c’est leur surprenante vitalité nihiliste ; cet oxymore décrit assez bien la faculté qu’a leur violence à se nourrir de sa gratuité. Bombarder les écoles et les hôpitaux non coraniques, lapider les femmes, accumule les morts sans faire progresser leurs idées. Une idéologie qui n’arrive même plus à se nourrir de ses cadavres, cela, par contre, est une réelle nouveauté.

Les femmes privées de soins et d’éducation meurent désormais plus jeunes que les hommes ; cela est aussi une nouveauté dans l’Histoire de l’Humanité où les femmes ont toujours eu une meilleure espérance de vie que les hommes, principalement chez les peuples guerriers.

Mais c’eût été faire insulte à leur inventivité que d’avoir pu supposer qu’ils s’arrêteraient là. Ils s’en prennent désormais aux mères et à leurs propres enfants. Le massacre des vaccinateurs au cours de l’année 2013 a dépassé tout ce que l’on pouvait imaginer. Alors que l’OMS était sur le point d’achever sa campagne d’éradication de la poliomyélite, l’assassinat de vaccinateurs et même de mères amenant leurs enfants, est un nouvel épisode de leurs prouesses médiatiques.

La poliomyélite était presque sur le point d’être la deuxième maladie éradiquée après la variole. Il faudra attendre encore un peu, car la mort des vaccinateurs devient un risque sanitaire désormais supérieur à celui de la polio.

Et, avant de retourner à nos léthargies, prions Allah et les dieux de tous les panthéons pour que la polio puisse être, un jour, la seule nuisance qui persiste pour les enfants de Talibans.

Vaccinations : entre sectarisme et dogmatisme

jeudi 2 mai 2013

Lorsque les historiens du futur jugeront la médecine (hors chirurgie), la « triade pastorienne », vaccins/hygiène/antibiotiques, sera considérée comme l’apport dominant. Cette triade magique a fait bondir de plus de vingt ans l’espérance moyenne de vie à la naissance.

Hélas, l’histoire de la vaccination est entachée d’une bévue politique dont nous continuons à payer les conséquences : l’obligation vaccinale. En réaction, diverses sectes anti-vaccinales apparurent, dont certaines paroisses sont parfois tenues par des médecins. La pugnacité de ces sectes leur permet de s’inviter au débat de chaque nouvelle vaccination. C’est ainsi que les vaccinations anti-rougeole et anti-hépatite B ont été déclarées, respectivement responsables d’autisme en Angleterre et de sclérose en plaques en France, semant un doute durable sur ces vaccinations très utiles.

Si la bévue initiale des obligations a été partiellement corrigée, puisqu’il n’en subsiste que trois en France métropolitaine (diphtérie, tétanos, polio), nous voyons poindre aujourd’hui un risque bien plus important.

Pendant plus d’un siècle et jusqu’à une date récente, l’introduction de nouveaux vaccins dans les calendriers vaccinaux était décidée par des autorités ministérielles ou académiques. Nous osons affirmer – j’espère, sans trop de naïveté – que ce registre de la santé est resté longtemps vierge de conflits d’intérêts, alors que d’autres étaient déjà largement parasités.

Depuis les années 1990, les choses ont changé et la logique marchande a fini par formater la pensée jusque dans le domaine encore miraculeusement épargné de la vaccination…

Les premiers doutes des médecins de terrain sont apparus avec les vaccins anti-pneumocoque et anti-méningocoque qui ont tout de même fini par s’imposer, car même si leur bénéfice est très faible, il est réel. Puis, ces médecins pragmatiques ont réussi à bloquer la promotion du vaccin anti-varicelle dont le rapport bénéfices/risques aurait été négatif.

L’exemple le plus emblématique est celui du vaccin anti-HPV(papillomavirus), dont le bénéfice n’est pas prouvé et qui fait cependant l’objet d’une vigoureuse promotion. Enfin, je m’inquiète de voir apparaître des publications vantant insidieusement les mérites du vaccin anti-rotavirus dont notre pays n’a nul besoin.

Cette abondance de promotion, pour des vaccins de moins en moins bénéfiques, doit nous faire craindre avant tout la montée d’une suspicion et d’une méfiance sans discernement à l’égard des tous les vaccins. Ce serait un dramatique recul, car les vaccins restent la plus formidable audace conceptuelle et la plus belle victoire de la médecine.

Pour répondre aux interrogations légitimes de ses patients, le médecin a de plus en plus de difficultés à éviter à la fois le dogmatisme et le sectarisme.

Décidément, le marché sanitaire est devenu trop complexe pour moi et je suis toujours sans nouvelles de l’antilope qui est allée saluer le lion.