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Défendons vraiment la thérapie génique et la solidarité

mardi 2 janvier 2018

Pendant des décennies, la thérapie génique était réduite à de fascinantes théories : les obstacles pratiques semblaient insurmontables. En 1995, l’espérance de vie réduite de certains enfants immunodéficients a rendu acceptable le risque d’essayer ces thérapies. Depuis une dizaine d’années, on apprécie enfin quelques retombées cliniques, certes négligeables en nombre d’individus bénéficiaires, mais avec un gain réel de quantité/qualité de vie pour ces rares élus. Des expériences récentes dans la maladie de Huntington, l’hémophilie B, la drépanocytose ou la mucoviscidose suscitent de nouveaux espoirs.

Sans jamais crier victoire, ces recherches doivent être une priorité médicale, car l’un des fondements de la médecine est de réparer les injustices de la nature. Faciliter l’accès à de tels traitements est aussi un impératif politique, puisque l’essence de la politique est de diminuer les inégalités sociales. Le point de jonction entre la médecine et la politique porte un nom : c’est la solidarité nationale. Celle-ci doit profiter d’abord aux grands perdants de la loterie génétique.

Hélas, selon un rituel désormais courant, la recherche se détourne des maladies monogéniques pour lesquelles ces thérapies géniques ont été théorisées, pour s’intéresser à des maladies de la sénescence aux gènes inconnus  (DMLA, Alzheimer, voire maladies cardio-vasculaires ou arthrose) ! N’en doutons pas, ces dernières pistes vont être privilégiées par les industriels en raison de l’importance numérique de la cible.

Ainsi la question cruciale de leur coût va vite devenir rédhibitoire. En effet, si la protection sociale remboursait ces thérapies dans les maladies dégénératives et tumorales de la sénescence, cette démagogie conduirait irréversiblement à la faillite du système public, donc à la privatisation de la protection sociale.

Un choix politique  clair et courageux est devenu urgent pour préserver notre belle solidarité nationale et la réserver à ceux qui en ont le plus besoin. Il faut dès maintenant refuser le remboursement de ces thérapies géniques déviantes et le réserver aux maladies monogéniques de l’enfance.

Les maladies de la sénescence peuvent présenter un intérêt de recherche fondamentale, mais son coût ne doit pas être supporté par la société. Ne doutons pas que les investisseurs et fondations privées seront nombreux à financer cette recherche ‘annexe’, car la promesse de l’immortalité  a toujours été un commerce très lucratif.

La sécurité sociale n’est définitivement plus compatible avec la démagogie ; elle n’a pas vocation à vendre l’illusion de l’immortalité. Continuer à rembourser des médicaments qui font gagner (ou perdre) quelques semaines de vie médiocre, reviendrait à condamner les enfants génétiquement pénalisés, à une deuxième pénalisation sociale.

A l’heure où les inégalités sociales se creusent, ne creusons pas les inégalités sanitaires et génétiques.

Références