Recyclages

En ces temps de préoccupations écologiques, le recyclage propose de donner une nouvelle vie aux plastiques, aux métaux et aux divers objets qui envahissent notre espace.

L’industrie pharmaceutique en a une conception particulière, plutôt que de recycler ses déchets en de nouveaux creusets, elle cherche de nouvelles indications thérapeutiques pour les molécules dont le commerce s’essouffle ou le brevet expire. Les essais cliniques qui accompagnent ces recyclages ont des résultats parfois positifs et souvent insolites.

Les glitazones qui se sont révélées inefficaces et dangereuses dans le traitement du diabète type 2 ont été relancées pour le traitement de la leucémie myéloïde chronique.  

Le thalidomide dont chacun connaît l’histoire catastrophique est aujourd’hui indiqué dans le lupus, les aphtoses sévères et le myélome.

Nous connaissons les amphétamines, ces drogues dont de multiples dérivés ont été déclinés par Servier. Si ce laboratoire a connu le fiasco du Médiator, d’autres ont été plus heureux avec la Ritaline indiquée dans le trouble déficitaire de l’attention chez l’enfant et dont les prescriptions augmentent vertigineusement sans trop émouvoir.

L’hydroxychloroquine, ce vieil antipaludéen, présente un intérêt dans la polyarthrite et le lupus et a été récemment proposé à grand bruit contre la covid-19.

Les douleurs chroniques sont un casse-tête, car toutes les drogues finissent par s’y fracasser ; aujourd’hui l’engouement se porte sur les antiépileptiques et les antidépresseurs. Ces derniers sont également prescrits dans l’énurésie, les troubles obsessionnels, le sevrage tabagique, l’obésité et la dysfonction sexuelle féminine.

D’une manière générale, les psychotropes figurent toujours au palmarès de ces extensions thérapeutiques. Le succès initial des neuroleptiques dans la schizophrénie a entraîné l’une des plus importantes dérives du recyclage, ils ont été proposés sans recherche supplémentaire pour des maux aussi divers que vomissements, insomnies, asthme, prurit, douleurs, ou encore, de façon plus fantaisiste, troubles des règles, anxiété banale ou déshydratation du nourrisson. On leur a récemment trouvé une vertu pour la covid-19, encore elle.

Mais la palme revient assurément aux statines, ces médicaments destinés à baisser le taux de cholestérol. On a réussi à leur trouver quelque efficacité dans la sclérose en plaques, l’asthme, la schizophrénie, la maladie bipolaire, l’ovaire polykystique, la migraine et treize types de cancer dont évidemment ceux du sein et de la prostate. On les a testés sans succès dans la démence, et enfin dans diverses infections dont… je vous laisse deviner laquelle.

Le génie mercatique ne cesse de m’étonner : après avoir cherché des molécules pour les maladies, on cherche aujourd’hui des maladies pour les molécules. Cependant, le succès de plusieurs de ces recyclages impose deux conclusions scientifiques : toutes les maladies sont plurifactorielles et aucune molécule n’a qu’un seul effet.

Références bibliographiques

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