Dépression de noël

Les pathologies varient selon les pays et les époques. Le terme de pathocénose désigne l’ensemble des maladies à une période donnée et dans un milieu géographique donné.

La dépression saisonnière est une forme particulière de dépression, rarement sévère, spécifique de nos latitudes, majoritairement entre le 40ème et le 50ème parallèle. Elle débute à l’automne avec un pic de premiers symptômes survenant peu après le passage à l’heure d’hiver. Avant d’être un diagnostic médical, elle était fort connue, et sa relation avec la baisse de luminosité avait été établie, comme le confirme l’amélioration des symptômes par la luminothérapie. Ce n’est pas un hasard si Noël et d’autres fêtes religieuses ou païennes ont été instaurées autour du solstice d’hiver, lorsque les jours sont les plus courts.

Mais son grand intérêt est de révéler les façons diamétralement opposées d’aborder une pathologie courante et banale.

Les botanistes et biologistes, dont les deux pieds touchent bien par terre, constatent sans surprise que l’homme, à l’instar des végétaux et de nombreux animaux passe par une période d’hibernation plus ou moins marquée. Cette pseudo-hibernation des dépressifs saisonniers est confirmée par leur hypersomnie et l’augmentation de leur appétit, contrairement aux autres dépressifs.

Les bio-thérapeutes, poussés par la recherche de brevets, cherchent des explications moléculaires autour de la photo-transduction rétinienne ou du métabolisme de la mélatonine. On pourrait en sourire si le projet n’était pas celui de piéger ces malades légers dans un traitement à vie.

Mais c’est le regard évolutionniste qui est le plus pertinent, le plus serein et le plus lucide devant ces patients qui guérissent toujours vers la mi-février. Homo sapiens a quitté son berceau Africain, il y a environ 100 000 ans. À l’échelle de l’évolution, c’est bien trop court pour que la totalité des individus soient adaptés à cette différence de longueur des jours et des nuits.

Étrangement, cette pathologie devient de plus en plus rare lorsque l’on monte vers les pays nordiques où les nuits sont parfois interminables. Pourquoi donc un tel paradoxe ? Réfléchissez-bien… Avoir un tel désavantage dans de tels pays est invivable, donc contre-sélectif. Seuls survivent ceux qui n’ont pas de problème avec le rythme circadien, à moins de pouvoir fêter Noël tous les jours de l’année.

Le regard évolutionniste en médecine est souvent la meilleure façon de comprendre et d’expliquer les troubles de nos patients. Dans ce cas, il nous permet de les protéger contre la prescription d’antidépresseurs qui transforment cette dépression réversible en une dépression chronique, par le jeu de la dépendance irréversible à ces médicaments.

L’art clinique doit être modeste, voire trivial. Les meilleurs traitements de la dépression saisonnière restent les lumières de noël, les feux du nouvel an et de l’épiphanie, et les chandelles de la chandeleur.

Références

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3 commentaires sur “Dépression de noël”

  1. durand dit :

    (((= YEEES merci au Pr Darwin !
    L’éveil de notre conscience anthropologique pour adapter nos comportements à notre responsabilité anthropologique ÇA UUUURGE !
    Merci Dr Périno !
    Bonne et joyeuse année à vous et au(x) Généraliste(s)
    cdurand

  2. marie dit :

    il ya aussi en montant vers le pole la finesse de la peau tres blanche type caucasien les yeux clairs bref un stockage de vitamine D plus facile qu pour les mediteraneens qui montent dans cette region en hiver ..
    bonne annee

  3. Julie dit :

    Bonsoir,
    Je n’avais pas la même notion que la vôtre concernant la latitude. J’avais en effet entendu qu’il existait un gradient de prévalence: cela est référencé ici http://www.cmse.ch/pdf/colloque_14_octobre/11_depression%20saisonniere.pdf mais il est prudemment indiqué que toutes les données ne convergent pas…

    Bien confraternellement!

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