Éthique décalée : la FDA interdit la vente d’un test génétique

En 2007, la société « 23andMe » commercialisait un test salivaire permettant d’établir une carte génomique personnelle pour 399 $. Nous avions alors dénoncé (réf) cette proposition qui prétendait évaluer le risque individuel pour les maladies les plus redoutables. La publicité alléchait le chaland en proposant de déterminer aussi la proximité génétique avec des célébrités ou avec une communauté ethnique ou socioculturelle. Devant de telles grossièretés, on peut s’étonner que la FDA n’ait pas réagi immédiatement en interdisant un tel commerce. D’autant plus qu’à l’époque, la recherche n’avait pas les moyens d’attribuer des interprétations solides à la plupart des polymorphismes nucléotidiques détectés sur les génomes.

Comme on pouvait s’y attendre, de nombreux diagnostics erronés ont été posés, ainsi que des prédictions fantaisistes dont on ne pourra jamais évaluer les prolongements psychologiques… D’aucuns diront qu’il faut déjà un profil psychologique particulier pour acheter de tels tests, et c’est certainement sur la connaissance de cette faiblesse humaine que le business plan de l’entreprise avait été élaboré.

Avec des clients de plus en plus nombreux, le prix du test a baissé à 99$ ; l’entreprise a fait fortune et prétend désormais pouvoir analyser jusqu’à 600 000 nucléotides ! Quel chercheur ne peut être pantois devant un si colossal travail de décryptage assuré par une seule entreprise commerciale ! Cela dans le mépris des incessantes découvertes en épigénétique qui relativisent toutes les prédictions cliniques issues des polymorphismes nucléotidiques.

Après de nombreux avertissements sans suite, la FDA vient de réagir en interdisant enfin la vente de ce test.

Ne rêvons pas… D’autres entreprises verront le jour, qui mêleront le sérieux de la recherche aux fantaisies du commerce. Google vient d’annoncer qu’il se lançait dans de grands investissements pour étudier la vieillesse et la longévité. Depuis deux-mille ans, la vie éternelle a toujours beaucoup rapporté à ceux qui en ont fait la promesse. Le business plan doit être très prometteur…

Notre vieille Europe semble être plus prudente. Certes il y a bien des sociétés européennes qui proposent de tels tests génétiques sur internet, mais nos eurodéputés ont adopté des résolutions pour encadrer ce type de commerce et les ont fait inscrire récemment dans les lois de bioéthique en raison d’un risque – je cite – de « conséquences dramatiques ».

L’éthique conséquentialiste consiste à poser les questions éthiques sur les conséquences d’une action AVANT de la mettre en place et avant même de réaliser des études permettant de l’évaluer.

L’Europe n’a pas encore compris qu’il faut faire de l’éthique conséquentialiste APRÈS ; ceci permet de sauver l’honneur sans perdre de gros marchés ! La FDA l’a compris !

Références

Mots-clefs : , , , ,

Laisser une réponse