Parachutes gériatriques

C’est vrai, cela existe. Je n’en ai jamais prescrit, mais je sais que cela se vend puisque j’ai vu des messages publicitaires et que dans un monde d’offres, la publicité se paie par les ventes et vice-versa…

Il s’agit de protection pour prévenir les fractures du col du fémur. Ce sont des coussins aqueux que l’on fixe autour du bassin pour protéger les hanches des personnes âgées en cas de chute.

J’ignore si cette prévention est efficace en pratique, mais en théorie l’idée n’est finalement pas plus ni moins stupide que l’air bag dont on dit qu’il a contribué à diminuer la mortalité et la morbidité routières.

Puisque nous ne pouvons pas prévenir tous les accidents, il est logique d’essayer d’en amoindrir les conséquences.  

Les essais cliniques doivent être difficiles et contestables par manque d’homogénéité des groupes. Les personnes acceptant d’exhiber les coussins aqueux n’ont certainement pas les même capacités cognitives que celles qui les refusent. Sauf, possiblement, certaines mamies encore coquettes, tentées par l’idée de séduire avec ces prothèses de rotondité coxale évoquant les crinolines de leur jeunesse. Le placebo doit être également de mise en œuvre contestable, car les coussins emplis d’air ou de mousse peuvent avoir une action similaire, et y mettre du gravier serait inique et son poids serait accidentogène.

Même si la chute fatale risque de se produire le jour où l’on aura précisément oublié les coussins protecteurs et fait un surdosage accidentel d’antihypertenseurs, acceptons donc cette offre, sans autres preuves, pour la protection de nos vieillards qui sont de plus en plus nombreux. Car, dans une société d’offre, le nombre est très important…

Mais alors, tant qu’à bien faire, soyons plus incisifs. Evitons à nos ancêtres qui hantent les couloirs des maisons de retraite, avec le but louable de susciter le commerce et la compassion autour de leur survie, de chuter lamentablement. Pourquoi ajouter à leur infamie, celle d’une éventuelle attitude grotesque après avoir rebondi sur leur coussin aqueux, affalés, la tête en déclive et les hanches inaptes à toute tentative.

Pourquoi ne pas leur accorder le meilleur de la technologie. Un détecteur de rupture de verticalité qui gonflerait un énorme coussin dorsal d’hélium dont l’ascension brutale éviterait l’humiliation d’une chute et les lombalgies des aides-soignantes.

Cela plairait aussi à leurs petits-enfants qui voudraient immédiatement avoir le même parachute que mamy. Et dans une société d’offre, la demande des enfants est fondatrice…

PS : Une récente méta-analyse Cochrane vient confirmer l’inutilité des protecteurs de hanche ! Je l’ignorais à l’écriture de ce texte !

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